14 janvier 2012

Meurtres en série




En mars 1933, Walter Benjamin lut à Paris Le meurtre de Suzy Pommier d’Emmanuel Bove, avant de partir à Ibiza en lisant (dans le train ?) Le meurtre de Piccadilly d’Anthony Berkeley, puis un Simenon, Le Relais d’Alsace (sur le bateau ?), le premier des cinq romans de Simenon qu’il emporta dans ses bagages, parmi tant d’autres littératures.




8 janvier 2012

Et les gants


Dans sa préface à l’édition de neuf romans d’Emmanuel Bove en un volume*, Jean-Luc Bitton cite Rainer Maria Rilke qui, dans une lettre à son traducteur Maurice Betz, écrit à propos d’Emmanuel Bove : « Dans ma jeunesse, on avait l’habitude de se faire des gants “sur mesure”. Se faire tenir la main par le gantier était une sensation très particulière. En lisant le plus récent livre de Bove j’ai eu le souvenir de cette sensation, jusqu’au sentiment physique des doigts exposés aux calculs du gantier. »
Gilles Ortlieb cite aussi ces propos de Rilke dans son texte Les Paradoxes d’Emmanuel Bove, paru dans Sept petites études aux éditions Le Temps qu’il fait, et introduit ainsi son texte : « Car il faut bien dire, d’emblée, que le nombre est restreint des écrivains dont la première lecture ait éveillé un sentiment du jamais lu, et dans lesquels on se voit aventuré avec une sorte d’incrudulité d’abord amusée, puis amusée de l’être, avant de se métamorphoser enfin, une fois la lecture achevée, en un saisissement songeur et plus grave, légèrement embarrassé de n’avoir, pour ainsi dire, rien à ajouter. »

En 1926, l’année de sa mort, Rilke rencontra Bove.


* mille&unepages, chez Flammarion

Et rendons aux éditions J. Ferenczi & fils la première publication de Mes amis, en 1924, grâce à  Colette.
ps : Et puis, comme nous sommes dans les escaliers et que nous faisons aussi dans la réclame, remontons les sept étages qui mènent chez Maurice & Léa, dans la bibliothèque desquels Emmanuel Bove figurait en bonne place, et en bonne compagnie : http://www.maurice-et-lea.blogspot.com/


6 janvier 2012

Sur son trente et un



« Pour que la nuit me parût moins longue, je rentrai tard.
Après avoir ôté ma veste, je m’accoudai à la fenête. L’air tiède me rappela les soirées de l’été précédent. La lune, pleine de taches d’eau, éclairait le bord d’un nuage.
Puis je me couchai.
Il fallait que je dormisse, sinon, le matin, j’aurais mauvaise mine. Mon visage n’est pas symétrique. Ma mâchoire est plus saillante à gauche. Quand je suis fatigué, cela se remarque davantage. »
Mes amis, Emmanuel Bove, 1927 (eaux-fortes d’André Dignimont)




Si on s’arrête à son maniement sans concession de l’imparfait du subjonctif, on pourrait prendre Emmanuel Bove pour un poseur, ou l’assimiler à n’importe quel écrivain bourgeois infatué. En 1927, il n’était pas le seul à user de ce qui est devenu un archaïsme (quoique son emploi ne soit toujours pas abandonné de tous, et qu’une journée lui soit désormais consacrée dans l’année comme pour une espèce en voie de disparition), la qualité d’un écrivain ne se jugeant pas à l’aune de cette perfection grammaticale qui confine à l’académisme, comme un dessin aux proportions parfaites, respectant tous les canons classiques mais ennuyeux à périr.
Or, pour Emmanuel Bove, c’est une manière d’élégance pour nous faire part de son pessimisme foncier (« Un pessimiste est un individu qui vit avec des optimistes. »), comme un dessinateur féru de classissisme, ayant copié les grands maîtres et accumulé les plâtres au fusain, qui retourne ses compétences pour nous dire sa vérité asymétrique et douloureuse, dont Malaises, de Gus Bofa, serait le plus juste équivalent graphique.

sur Gus Bofa et son ami André Dignimont : http://www.gusbofa.com



1 janvier 2012

Neuesjahrtag 1929 & 1933




Dans le numéro du 1er janvier 1929 du Simplicissimus, Karl Arnold offre à ses lecteurs un panorama de l’année qui s’annonce.

Dans celui de 1933, Th. Th. Heine, sous le titre « 1933, année de la nouvelle humanité », illustre un sombre présage : « La recrudescence de l’occultisme mènera à nouveau les sorcières au bûcher. Dans l’époque qui s’annonce, elles seront livrées en paquets à la population la plus pauvre. »