13 septembre 2011

Un mariage déconcertant


Germaine Tailleferre (du groupe des Six avec Poulenc, Milhaud, Auric, Durey et Honegger) fut l’épouse de Ralph Barton à qui elle dédia ce concertino pour harpe et piano composé en 1927, peu après leur mariage.





Bruce Kellner*, le biographe de Barton, écrit : « His considerable charm, of which both friends and enemies spoke, his impecable manners, his flawless French prononciation, and his ardor for all things French, could not have failed to win some attention from Germaine Tailleferre, who spoke no English and had never felt comfortable in America. After the party, he offered to drive her back to her hotel in his white Voisin. En route he asked her to marry him the next day. She thought he was making fun of her, joking, but he was deadly serious. Some years earlier, Germaine Tailleferre had suffered a heartbreaking love affair; she would never love that way again, she reflected long afterward in attempting to explain to herself why she had accepted Barton’s offer. »


Germaine Tailleferre rencontra Charlie Chaplin quand il débarqua chez le couple quelques jours après leur mariage, à New York, où il consultait son avocat pour préparer son divorce d’avec Lita Grey.
« Comme j’admirais beaucoup ce qu’il faisait, je l’ai poussé à ce qu’il fasse lui-même la musique de ses films. Je lui disais: “Cela vous ressemble tellement, cela émane tellement de votre personnalité, ce n’est pas la peine d’avoir des nègres. Il faut avoir des nègres pour transcrire la musique, pour transposer, pour lui donner une forme quelconque, mais il faut donner vos thèmes vous-même”. Il n’osait pas trop, tout de même, se risquer. Il m’avait demandé de l’aider à ce genre de travail ; c’était au moment où il préparait son film Circus. Alors nous avons joué des thèmes ensemble et il voulait que j’aille à Hollywood pour les travailler avec lui. Seulement mon mari n’a pas voulu et je n’ai pas pu aller à Hollywood ; cela m’aurait beaucoup amusée, mais enfin cela ne s’est pas arrangé. En général les maris détestent que les femmes se fassent remarquer d’une façon ou d’une autre. Moi je n’aurais pas demandé mieux que de rester anonyme, mais Charlie voulait que je signe avec lui. Nous sommes partis en France, mon mari et moi, et je verrrai toujours, pendant que le bateau s’éloignait, notre pauvre Charlie qui était là sur le quai, qui nous regardait tristement et qui resta tout seul très longtemps à regarder le bateau disparaître. » (entretiens avec Georges Hacquard, 1979)


Ralph et Germaine dans leur patio du 46 rue Nicolo à Paris (aujourd’hui, semble-t-il, clinique de la Muette).

Ralph Barton se suicida un mois après son divorce. Mais la passion de sa vie resta l’actrice Carlotta Monterey qui, deux ans auparavant, avait épousé le dramaturge Eugene O’Neal qui venait de divorcer d’Agnes Boulton, la mère d’Oona qui, quinze ans plus tard, devint Oona Chaplin au grand courroux de son père qui ne lui pardonna jamais.

* The Last Dandy (préface de John Updike), University of Missouri Press

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