« […] Les romans de Ledig*, qui ne cèdent en rien aux travaux d’autres auteurs des années cinquante qu’on cite et étudie encore maintenant, furent exclus de la mémoire culturelle parce qu’ils menaçaient de rompre ce cordon sanitaire mis en place par la société autour des périmètres de mort résultant des brèches dystopiques existantes. Ces brèches étaient au demeurant non seulement le produit […] d’un mécanisme de destruction aux dimensions industrielles, mais aussi la conséquence de la propagation, de plus en plus débridée depuis les tumultes de l’expressionnisme, d’un mythe du déclin et de la dévastation. Anticipant la rhétorique fasciste du combat jusqu’au dernier souffle, le film de Fritz Lang La Vengeance de Kriembild, de 1924, en est le pradigme le plus fidèle, où toute la force armée d’un peuple court plus ou moins sciemment à sa perte pour finalement s’anéantir dans les bûchers d’un spectacle pyromaniaque qui frappe de stupeur. Et tandis qu’à Babelsberg Lang mettait en images reproductibles les visions de Thea von Harbou pour le public allemand, les spécialistes en logistique de l’armée travaillaient déjà, une décennie avant la prise du pouvoir par Hitler, à une ahurissante réédition de l’exploit des Chérusques écrasant les troupes romaines de Varus, un script à vous glacer les sangs qui prévoyait l’anéantissement des troupes françaises sur le sol allemand, la dévastation de contrées entières et des pertes sans nombre parmi la population civile. »
* Gert Ledig (1921-1999), Vergeltung (Sous les bombes), 1956, réédité en Allemagne en 1999, traduit chez Zulma en 2003.
La mort de Siegfried vue par Th. Th. Heine dans le Simplicissimus du 7 avril 1924
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Siegfried dans Fritz Haber de David Vandermeulen (Delcourt) |
Ce blog a déjà vu passé Siegfried, et Fritz Lang, dans un tout autre contexte :
http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2011/08/bisbilles-au-cine-moka.html
Et pour retrouver W. G. Sebald, outre lire ses livres, une seule adresse : http://norwitch.wordpress.co
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