24 septembre 2014

Lecture à Manhattan



dessin de d’Amy Drevenstedt




En 1930, Charles Ezekiel Reznikoff, né à Brooklyn en 1894 de parents juifs fraîchement émigrés de Russie, publie son premier livre édité par Charles Boni Jr.
Il vient d’être traduit par les éditions genevoises Héros-Limite. 









« Ezekiel passait le plus clair de son temps à la bibliothèque de la 42e Rue. Par grand soleil, sous la pluie, dans le ventre du vent tel un nouveau Jonas, il avait arpenté les rues ; à la maison, il avait esquivé les coups d’œil de son père. À présent, il chassait les ambitions importunes : il agirait à sa guise. Pour commencer, il se mettrait à son compte. Le travail pour autrui, c’est terminé — pour autant qu’il travaille.
Il connaissait un local dans un sous-sol de Greenwich Village. La rue ne longeait qu’un unique pâté de maisons, s’étirant en demi-cercle d’un unique pâté de maisons, s’étirant en demi-cercle d’une ruelle tranquille à une autre. D’autant mieux, pensa-t-il, pour la librairie qu’il avait en vue. L’endroit était vide depuis des années, aussi longtmeps qu’il s’en souvienne.
Il était conscient de ses habits chiffonnés, avachis, luisants des innombrables heures passées à s’instruire sur les chaises de la bibliothèque. Il sentait les trous béer dans ses deux semelles, mais se raisonnait, sachant que seul le trottoir connaissant son secret. Qu’as-tu donc à perdre ? s’encourageait-il sans cesse. »
Charles Reznikoff, Sur les rives de Manhattan
(traduction Eva Antonnikov)




n°407

18 septembre 2014

Vishniac à Paris







Vue sur l’œuvre de Roman Vishniac (1897-1990), au-delà de ses célèbres photographies témoignant de la vie juive dans les communautés d’Europe orientale entre 1935 et 1938, dont l’album A Vanished World fut publié en 1983.
http://www.mahj.org/documents/dossier-presse-Roman-Vishniac-Berlin-New-York.pdf

Tout Vishniac mis en ligne : http://vishniac.icp.org/
Dans notre colonne de Trentehttp://plusoumoinstrente.blogspot.fr/search/label/Roman%20Vishniac




n°406

11 septembre 2014

Keaton de face et de profil



1931, avec ses enfants Bobby et Jimmy



Buster Keaton est présent sur Facebook, à cette heure (10 h 52) 75673 personnes le suivent déjà. Si vous fréquentez ce réseau, il serait dommage de passer à côté de cette grande richesse iconographique, et si vous ne le fréquentez pas, vous auriez une bonne excuse pour y succomber.




1930


ca 1930



n°405


7 septembre 2014

Londres à Jérusalem



1929


« La Pologne, la Roumanie ont succédé à la Russie. Mais la Pologne et la Roumanie ont acheté à la Russie ses stocks antisémites. Le Juif, là-bas, est toujours un Juif. Peut-être est-il un homme, en tout cas, ce n’est ni un Roumain ni un Polonais. Et s’il est un homme, c’est un homme qu’il faut empêcher de grandir. De toute l’histoire des Juifs, l’Europe orientale n’a retenu que celle de Job. “Périssent le jour où je suis né et la nuit où il a été dit : un homme a été conçu !” Bien parlé ! répondent nos frères slaves et latins. Aussi trouvent-ils indispensable que les descendants d’Abraham restent assis où l’autre, je veux dire Job, aimait à s’asseoir. Le problème juif est compliqué, mais je crois qu’il se résume en une question d’air. Respirer ou ne pas respirer. Ni plus ni moins. »



1930



n°404

1 septembre 2014

L’ultime Barton



Ralph Barton, The New Yorker, 4 avril 1931



Voici les huit dernières pages publiées par Ralph Barton avant sa mort à quarante ans, le 20 mai 1931, que son biographe Bruce Kellner décrit ainsi :
« On May 20, at about one oclock in the morning, he went into the bedroom, stretched out on the bed, and smoked a cigarette. Then he lit another cigarette. Then he opened Gray’s Anatomy to a drawing of the human heart. Then he thought better of it and shot himself in the head.»


Ralph Barton, The New Yorker, 11 avril 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 18 avril 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 25 avril 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 2 mai 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 9 mai 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 16 mai 1931

Ralph Barton, The New Yorker, 23 mai 1931



Sans vouloir interpréter abusivement cette série, notons qu’une profonde mélancolie y est particulièrement visible.
Rappelons ce qu’écrivait Chaplin dans ses mémoires :
« Je comptais maintenant me rendre à Londres pour y présenter “Les Lumières de la ville”. Pendant que j’étais à New York, je vis beaucoup mon ami Ralph Barton, un des rédacteurs du New Yorker, qui venait d’illustrer une nouvelle édition des “Contes drolatiques” de Balzac. Ralph n’avait que trente-sept ans, c’était un garçon excentrique et très raffiné, qui s’était déjà marié cinq fois. Il était déprimé depuis quelque temps et avait tenté de se suicider en avalant une forte dose de je ne sais quel médicament. Nous embarquâmes donc tous les deux sur l’Olympic, le bateau à bord duquel j’étais revenu pour la seconde fois en Amérique. »


n°403