25 décembre 2012

Invitation à la promenade





Ce dimanche de printemps-là, Robert Walser répond à « la bonne invitation de Frieda Mermet à monter à Bellelay, à pied ou en car, pour le plaisir de passer huit à dix jours en [sa] compagnie ».

Robert Musil disait de Robert Walser qu’« au jeu littéraire, [il] substitue un jeu humain, plein de souplesse, de rêverie, de liberté et qui offre toute la richesse morale de ces journées d’oisiveté, inutiles en apparence, où nos convictions les plus fermes se défont en une agréable indifférence ».
Et Thomas Mann « ce géant dans le domaine de l’écriture romanesque, me considère, écrit Walser à Therese Breitbach en 1925, comme un enfant tout de même intelligent ».




Walser publia en 1925 chez Rowohlt son dernier livre, un recueil de courtes proses, La Rose, dont il dit, en janvier 1926 dans une lettre à Otto Pick, quil « semble frappé de bannissement et de proscription. Rowohlt, à la suite de léchec de ce livre, me traite en vrai Germain quil est, avec toute limpolitesse quon imagine. Néanmoins, je le sers. L’un ou l’autre poème va bien vous plaire. Il y a des gens en Allemagne qui semblent avoir pris la culture en otage, ils croient qu’à force de réfléchir, à force d’y mettre terriblement de sincérité, de solidité, de sérieux, tout ira selon leur tête. Et il y en a qui sont chatouilleux. Tous ces gens chatouilleux, ces gens cultivés, constituaient en 1900 un danger pour l’ordre public ».
Rober Walser est mort le 25 décembre 1956, dans la neige, lors dune promenade dans la montagne.

http://80grammes.blogspot.fr/2012/12/1956-56_25.html

21 décembre 2012

La Santé en 39-40


En 1969, alors qu’Adolf Hoffmeister est réfugié en France après l’écrasement du Printemps de Prague en août 1968, les éditions Gallimard publient La prison où il raconte son séjour à la Santé entre 1939 et 1940, accompagné de six dessins de ses codétenus.
En avant-propos, Hoffmeister présente ainsi son livre : « Réfugié en France après l’occupation de la Tchécoslovaquie par les nazis, porté sur la liste noire de la Gestapo, j’ai été arrêté et mis en tôle à Paris pendant la drôle de guerre pour les opinions trop avancées et trop libres à cette époque de l'histoire. C’est à la prison de la Santé que j’ai écrit, pendant sept mois, en confinement solitaire, ce journal et ces dialogues de détenus. »

Adolf Hoffmeister, 1940


Le premier chapitre s’intitule L’abandon : « Le 24 septembre 1939, se refermait sur moi la porte de la cellule numéro 10, douzième section de la prison de la Santé. Il était environ 13 h 30. Cétait un dimanche à Paris. Le temps était clair, et un peu frais.
Tout dabord, je métais senti gêné, oui, confus. Puis amer, à en rire, à lidée que je pouvais me retrouver en prison.
Quelle idée insensée ! Est-ce donc aux adultes aujourdhui de jouer aux enfants ? Ou bien ne sommes-nous que des enfants qui jouent aux adultes ? Ma conscience navait rien à se reprocher, et le décalage était trop criant, tant laccusation était grave. Quelle tournure soudaine avaient pris les événements de ces dernières semaines. Quelle métamorphose complète de tout !
Une chose au moins était claire : notre navire avait fait naufrage. […] »




http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/12/the-animals-are-in-cages.html

18 décembre 2012

The Animals Are in Cages





L’édition originale américaine de Touriste malgré soi, récit écrit et dessiné par Adolf Hoffmesiter
http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/a-prague-avec-adolf-hoffmeister.html, parue en 1941 à New York chez Greenberg s’intitule The Animals Are in Cages http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/12/touriste-malgre-soi.html, magnifiquement imprimée sur papier vergé, quand l’édition polonaise de 1946, avec les illustrations sans doute reprises d’après cette première édition, devait se contenter d’un pauvre papier typique de l’après-guerre.
Pour commencer, après avoir situé Prague pour un public américain : « Beyond the Atlantic, eastward from New York, there is a continent called Europe. In the center of this continent is a small country about whose beauty not many people know. And in the center of this wonderful land is a still more wonderful city called Prague », Adolf Hoffmeister précise à propos de son personnage central : « His name was Jan Prokop, but any resemblance between characters in this book and real persons, living or dead, is purely coincidental » et, un peu plus loin, le personnage se présente comme « A writer and catoonist. 5 1/2 feet tall, weight 170, age 37, Catholic, bachelor, residing at — », comme son auteur*.



* Quand on tape Hoffmeister, et même Adolf Hoffmeister, sur Google, s’affiche tout en haut une annonce pour un hôtel cinq étoiles éponyme, celui fondé à Prague par son père et qui est toujours tenu par sa famille. 














16 décembre 2012

Une première pour Laurel & Hardy


Puisque Laurel & Hardy sont au programme, qu’ils se sont faufilés entre Kafka et Walter Benjamin à la page précédente, rappelons-nous qu’il y a quelque temps nous les avons fréquentés d’assez près. 


Dominique Hérody, Laurel & Hardy, 1991, pour Virgin Video

http://80grammes.blogspot.fr/2012/12/dun-autre-temps.html

14 décembre 2012

Kafka, Laurel & Hardy…



Miguel Covarrubias in Vanity Fair, 1933



1. John Barrymore 2. Ethel Barrymore 3. Lionel Barrymore 4. George Arliss 5. Helen Hayes 6. Miriam Hopkins 7. Lilyan Tashman 8. Mae West 9. Edmiund Lowe 10. Constance Bennett 11. Joel McCrea 12. Maurice Chevalier 13. Kay Francis 14. Joan Crawford 15. Leslie Howard 16. Dolores Del Rio 17. Adolphe Menjou 18. Joseph Schenck 19. Samuel Goldwyn 20. Joan Blondell 21. Douglas Fairbanks, Jr. 22. Sylvia Sidney 23. Mary Pickford 24. Gary Cooper 25. Douglas Fairbanks 26. & 27. Laurel and Hardy 28. Edward G. Robinson 29. Cecil B. Demille 30. Caludette Colbert 31. Marion Davies 32. Norma Shearer 33. Charlie Chaplin 34. Fredric March 35. Marie Dressler 36. Gene Fowler 37. Nancy Carroll 38. Howard Hughes 39. George Raft 40. Louella Parsons 41. Harpo Marx 42. Katherine Hepburn 43. Jean Harlow 44. Marlene Dietrich 45. Schnozzle Durante 46. Greta Garbo 47. Clark Gable 48. Ernst Lubitsch 49.Wallace Beery





« […] Kafka […] n’était certes pas un humoriste. Mais plutôt un homme dont le destin était de se heurter partout à des gens qui faisaient de l’humour leur profession : à des clowns. L’Amérique, en particulier, est une vaste clownerie. Et pour ce qui concerne son amitié avec Brod, j’ai l’impression de m’approcher de la vérité si je dis que Kafka était un Laurel qui se serait trouvé dans la pénible obligation de se chercher son Hardy — et ce fut Brod. »

Lettre de Walter Benjamin à Gershom Scholem, Paris le 4 février 1939



Max Brod & Franz Kafka


12 décembre 2012

Les larmes de Mickey





Simplicus, 1935. La NRA* et Mickey Mouse.
Mickey Mouse : « C’est fou ! Le monde entier se moque de moi au lieu s’en prendre à cette affiche ! » 

National Rifle American

11 décembre 2012

Antonín Pelc et l’Espagne



Antonín Pelc dans le Simplicus, à propos de la répression dans les Asturies
 que mena le général Franco, en octobre 1934, à la demande de la IIe République.


Antonín Pelc, 1936

4 décembre 2012

Touriste malgré soi



Adolf Hoffmeister, Turysta mimo woli, 1946



En 1946, parut cette édition polonaise de Touriste malgré soi (Turistou proti své vůli) qu’Adolf Hoffmeister, au terme d’un périple résumé sur cette couverture, avait écrit et dessiné aux États-Unis en 1941, sous le titre Animals are in Cages, à la demande de l’éditeur américain Greenberg dans le but de sensibiliser le public américain. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une autobiographie, mais d’un récit de l’exil d’un certain Jan Prokop qui ressemblerait fort à l’auteur. 



Adolf Hoffmeister, Touriste malgré soi, 1941



Adolf Hoffmeister, Touriste malgré soi, 1941


Adolf Hoffmeister, Touriste malgré soi, 1941(camp de Damigny ?)


Adolf Hoffmeister, Touriste malgré soi, 1941

3 décembre 2012

Acharnement


Josef Plank, Die Brennessel, 19 avril 1933


Quand Die Brennessel (L’Ortie), fondée en 1931 par les nazis pour contrer l’influence du Simplicissimus, s’acharne contre Th. Th. Heine qui vient d’être destitué de l’intérieur même du journal — et qui est alors en fuite. 
Le 20 mars 1933, fuyant Berlin, Walter Benjamin est à Paris depuis quelques jours et écrit à Gershom Scholem : « […] La terreur exercée contre toute attitude ou toute façon de s’exprimer qui ne se conforment pas strictement aux prescriptions officielles a pris des proportions difficilement dépassables. »


30 novembre 2012

Le Fred Astaire du football





La coupe du monde de football 1934, la deuxième après celle en Uruguay, eut lieu en Italie fasciste qui profita pleinement de l’aubaine pour sa propagande, surtout qu’elle l’emporta contre la Tchécoslovaquie (2-1), la Tchécoslovaquie ayant battu l’Allemagne en demi-finale (3-1), à Rome, alors que la Nazionale battait l’Autriche dans l’autre demi-finale (1-0), l’Autriche où figurait le “Mozart du football” Matthias Sindelar, son avant-centre, qui s’y blessa, facilitant la tâche des azzuri qui n’avaient pas le droit de perdre devant Mussolini.
À lire les descriptions de son physique et de son jeu, autant que Mozart, il fut le Fred Astaire du football.

D’origine tchèque, Matěj Šindelář se suicida en 1939 avec sa compagne juive italienne Camilla Castagnola, à moins qu’il fût assassiné par la Gestapo.






Soma Morgenstern, dans Errance en France, évoque Matthias Sindelar en décrivant un match de football improvisé au stade de Buffalo, en mai 1940, entre internés, où […] l’Autriche, renforcée par deux puissants Sarrois, battait lAllemagne par 6 buts à 0 ! Comme autrefois à Vienne, au Prater, au stade, en 1931. Oh, comme cétait beau ! Vous rappelez-vous encore comment dès le départ, Sindelar, « l’homme de papier », dribble deux Allemands avec une feinte de corps, et d’un coup horizontal passe le ballon à Gschweidl, le « conseiller aulique », et le « conseiller » le prolonge vers Zischek qui avec présence desprit tire du pied gauche dans le coin droit des buts ? Trente secondes après le commencement du match : 1 à 0, et onze Piefkes stupéfaits ! Cest Schall qui a inscrit le deuxième but. Non, et Vogl, le Vogl ! Cétait léquipe miracle de Vienne. Hugo Meisl l’a créée. Il est mort. Sindelar l’a dirigée. Après lAnschluss, il s’est suicidé. C’était l’âme de l’équipe miracle, le Sindi. Le football aussi à une âme. Mais c’était l’âme viennoise. Sous le talon de la botte prussienne, elle a éclaté, l’âme footballeuse de Sindi. Quel était son prénom ? Matthias. Il était serrurier de son métier, « l’homme de papier ». Honneur à sa mémoire. 
(Ajouté le 26 décembre 2016, traduction Nicole Casanova, à deux modifications footballistiques près)

26 novembre 2012

La couleur du Simplicus



Black and White, Antonín Pelc, Simplicus, 1935



Pokrok (Progrès), Antonín Pelc, Simplicus, 1934
« Dříve nas vyhazovali na dlažbu, dnes bohudíky, už máme asfalt »
(Avant on nous jetait sur le trottoir, aujourd'hui, par bonheur, nous avons de l’asphalte)


http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/le-simplicissimus.html
http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/a-prague-avec-antonin-pelc.html

24 novembre 2012

À Prague avec Adolf Hoffmeister



Adolf Hoffmeister, Simplicus n°4, 1934
L’ordonnance : “Nous vous annonçons humblement le nouveau magazine, le Simplicus. ”
Le censeur : “Attendez un peu, je dois tailler mon crayon !”



Adolf Hoffmeister est né à Prague en 1902 dans une famille aisée propriétaire d’un grand hôtel. Il voyage à Paris en 1922 où il côtoie le groupe surréaliste, se lie à Soupault et à Tzara, rencontre Le Corbusier, et s’engage alors dans la peinture tout en finissant ses études de droit une fois rentré à Prague. Mais en 1925, son doctorat en poche, il débute dans la caricature, tant de portrait (Cocteau, Maiakovski, Pasternak, Kafka, Seifert, Gorki, Aragon, Joyce…) que politique, particulièrement après l’arrivée de Hitler au pouvoir, dans le Simplicus (http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/le-simplicissimus.html). Il émigre en 1939 vers la France où il est tenu pour un agent de Moscou suite au pacte germano-soviétique, mais parvient à gagner le Maroc, puis le Portugal, Cuba et enfin les États-Unis où, avec Antonín Pelc (http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/a-prague-avec-antonin-pelc.html)il expose au musée d’art moderne de New York. 

Adolf Hoffmeister et Antonín Pelc entourant le président Beneš en exil 
lors du vernissage de leur exposition au Musée d’art moderne de New York, en 1943

En 1945, il est désigné pour représenter la Tchécoslovaquie à l’UNESCO qui siège à Paris, puis devient ambassadeur de son pays en France après le coup de force communiste en 1948, jusqu’au moment du procès Slansky, en 1951, où il est rappelé à Prague et ramené désormais à la seule fonction de professeur à l’école supérieure de cinéma et des arts graphiques (VSUM-PRUM). Dans cette deuxième partie de sa vie, s’il n’abandonne pas la caricature, il privilégie cependant le collage et l’illustration. Hoffmeister meurt en 1973, de retour dans son pays, après avoir quitté la Tchécoslovaquie pour revenir en France quand les troupes du Pacte de Varsovie achevèrent le printemps de Prague, pour y être enseignant à l’université de Paris VIII, à Vincennes.



L’art dans le IIIe Reich, Adolf Hoffmeister, Simplicus n°1, 1934



Le IIIe Reich en avril : on ne voit plus la famille Goebbels à aucune festivité
car elle se consacre entièrement à des tâches spirituelles
, Adolf Hoffmeister, Simplicus n°10, 1934



Pablo Picasso peignant Guernica, Adolf Hoffmeister, 1937


Le bienfaiteur : “Bientôt je vous donnerai du gaz pour rien”, Adolf Hoffmeister, Simplicus n°34, 1934 



23 novembre 2012

Deux fois Heine



Th. Th. Heine sur le sofa, Olaf Gulbransson, 1904,
dessiné pour le catalogue des éditions Langen




Th. Th. Heine, Olaf Gulbransson, vers 1933



19 novembre 2012

Le numéro du 12 février 1933


Le numéro du 12 février 1933 est le dernier avant que le Simplicissimus ne bascule et se soumette. À la même date, Thomas Mann se voyait sommé de renoncer à une conférence sur Wagner : http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/09/thomas-mann-ecrit-olaf-gulbransson.html





Cette couverture fut comprise comme une provocation, prétexte aussi pour se débarrasser du Juif Heine — cruauté d’autant plus grande qu’il se sentait absolument allemand bien avant que d’être juif, comme Max Liebermann, Alfred Döblin et combien d’autres « Juifs assimilés ». Le procès en sorcellerie au sein même de la rédaction, Eduard Thöny et Erich Schilling en tête, l’éjectera, même si une interdiction d’un an seulement fut alors prononcée alors que c'était bien Dachau qui lui était promis. http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/10/dernier-printemps.html
Jean-Michel Palmier souligne que pour continuer de travailler, tous les artistes devaient s’affilier aux chambres de culture, ici la chambre d’arts plastiques du Reich, ou celle pour la presse, instaurées par le Dr. Goebbels. Notons également que les dessinateurs satiriques se compromirent dans des proportions infiniment plus grandes que les écrivains et, dans une moindre mesure, que toutes les autres catégories d’artistes, comme si le clivage au sein de cette population vis-à-vis du nazisme ne s’était prononcé qu’en fonction de la « race » de chacun — ce qui ne laisse d’interroger.
Deux mois plus tard Heine prendra le chemin de la Tchécoslovaquie dont la grande générosité envers les proscrits fut particulièrement remarquable.

Le 2 mai 1933, de Prague, hébergé chez le Dr. Alfred Mayer, Heine écrit à Franz Schoenberner, lui aussi exclu du Simplicissimus dont il était le rédacteur en chef, et contraint à l’exil en franchissant les Alpes le 19 mars pour gagner la Suisse en alpiniste, puis en France où à la déclaration de guerre en 1939 il fut détenu au camp des Milles près d’Aix-en-Provence, et enfin aux États-Unis, via Marseille et Lisbonne, grâce à Victor Fry et l’Ermergency Rescue Committee. Cette correspondance dura jusqu’en 1947.

« Nur kurz die Nachricht, daß es mir endlich gelungen ist, hierher zu fliehen. Wie geht es Ihnen ? haben Sie Pläne ? […] Ich schreibe Ihnen bald, hoffe aber bald auf ein Lebenszeichen von Ihnen. Zuletzt war ich fast 3 Wochen in Berlin verborgen. 
Herzliche Grüße
immer Ihr Th. Th. Heine »*

* Pour faire bref, la nouvelle est que j’ai finalement réussi à m’échapper jusqu’ici. Comment allez-vous ? Vous avez des projets ? […] Je vous écris bientôt, mais j’espère aussi bientôt un signe de vie de votre part. En dernier lieu, j’ai été caché près de 3 semaines à Berlin.
Je vous salue de tout cœur, 
votre fidèle Th. Th. Heine





Erich Schilling, thuriféraire du nazisme, veilla de près à l’application de ses préceptes, jusqu’à son suicide en 1945 à l’arrivée des troupes américaines dans sa petite ville bavaroise.




Karl Arnold, bien que certaines biographies bienveillantes ou mal informées écrivent qu’il fut interdit de travail pendant six mois, sa collaboration ne cessa jamais et ce régulièrement jusqu’en 1943 quand il tomba malade (http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2013/10/le-reniement-darnold.html), dirigeant même le Simplicissimus dans les premiers mois de 1934, accompagnant la politique officielle, versant lui aussi dans la caricature antisémite, et réservant son esprit caustique aux adversaires du IIIe Reich, par exemple en transposant la manière dont fut couverte la Première Guerre mondiale par le Simplicissimus, les bellicistes étant toujours français ou anglais (les Soviétiques tirant les ficelles), et pour cela il usa d’un dessin de plus en plus gracieux, d’une absolue perfection formelle.




Quel symbole aussi que soit publié in extremis une critique élogieuse de Solal d’Albert Cohen, dans cette fameuse colonne de critique littéraire commandée par le chien emblème de la revue dessiné en 1895 par Th. Th. Heine. N’oublions pas que le Simplissicimus était une revue littéraire, fondée par l’éditeur Albert Langen qui publia tout ou presque de ce qui compta dans la littérature allemande et mondiale du moment.
Alexander Moritz Frey émigra en Autriche en 1933, puis réussit en 1938 à passer en Suisse, pourtant si peu accueillante.





Marcel Frischmann, Juif galicien, s’exila en Angleterre en passant par la Suisse. http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/search/label/Marcel%20Frischmann




Olaf Gulbransson ne montra aucun état d’âme en accompagnant allègrement la nouvelle ligne de la revue à laquelle il collaborait depuis trente ans.




Wilhelm Schulz devint une nazi bon teint (à moins qu’il le fût déjà), comme beaucoup sous couvert d’anticommunisme, le Simplicissimus n’ayant jamais eu la moindre sympathie pour cette idéologie.

17 novembre 2012

À Prague avec Antonín Pelc



Antonín Pelc, Le manifeste tchèque du surréalisme, 1935

Antonín Pelc est né le 16 janvier 1895 à Lišany u Rakovníka en Tchécoslovaquie, dessinateur, peintre et illustrateur, il débute en 1919 dans le šibeničky après des études aux Beaux-Arts de Prague de 1913 à 1916 et sa démobilisation, pour devenir dans les années vingt un caricaturiste politique très en vue, dans le Simplicus http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/le-simplicissimus.html, le Rude Pravo communiste, Lidové NovinyKulturní tvorbaLiterární noviny… jusqu’à publier dans le New York Times. Très impliqué dans le combat antifasciste, il dut s’exiler en 1939 mais, après un séjour à la Santé, il fut interné en France au camp de Damigny, gagne la Maroc en 1940, où il est de nouveau arrêté et interné, puis la Martinique, avant de réussir à atteindre les États-Unis, où il expose en 1943 au musée d’art moderne de New York en compagnie de son ami Adolf Hoffmeister avec lequel il avait partagé son périple, avant de revenir dans son pays à la Libération pour y devenir professeur, d’abord à l’École des arts appliqués puis à l’Académie des Beaux-Arts de Prague, se consacrant principalement à la peinture tout en soutenant le régime communiste dont il reçut tous les honneurs comme celui d’“Artiste national” en 1963. 
Il meurt en 1967, alors que débute le “Printemps de Prague”.



Antonín Pelc, Národní divadlo o sobě, 1935-36


Antonín Pelc, Autoří podpisují svá díla1935-36


Antonín Pelc, Divadla se připravují, 1935-36


Antonín Pelc, Šetřte plynem!, 1935-36


Antonín Pelc, Volební týden výtvarného umění, 1935-36

15 novembre 2012

Le Simplic[issim]us



Antonín Pelc,  Simplicus n°1,
où l’on distingue Karl Arnold, Olaf Gulbransson, Wilhelm Schulz et Eduard Thöny.

Dans l’article ci-dessous, David Alon ne recoupe pas complètement Jean-Michel Palmier qui écrivait que le Simplicus n’avait vécu guère plus d’un an. http://plusoumoinstrente.blogspot.fr/2012/11/simplicissimus-en-exil.html

« Avec la montée des idéologies, la caricature tchèque se politise dans les années 30. En janvier 1934, un groupe d’artistes allemands exilés de l’Allemagne nazie sort à Prague le premier numéro de Simplicus, hebdomadaire satirique. Composé également de nombreux artistes tchèques, Simplicus devient un pôle majeur de lutte contre le danger national-socialiste. Ses armes : l’humour, l’ironie et la satire. On compte, parmi ses signatures, les caricaturistes Antonín Pelc et Adolf Hoffmeister.

Le thème du corps, qui revient souvent au long des publications, est d’abord un prétexte pour s’éloigner de l'esthétique nazie, basée sur la virilité et la masculinité. Il permet aussi, par l’évocation de relations entre nations et religions différentes, de lutter contre les mythes racistes, si puissants dans les années 30. C’est avec une ironie savoureuse que Frantisek Bidlo donne, dans Simplicus, sa définition du mâle aryen idéal : “blond comme Hitler”,“mince comme Goering”, “bien bâti comme Goebbels” et “masculin comme Röhm”. En 1934, se tient, dans la galerie Manes à Prague, la première exposition internationale de la caricature, où les préoccupations contre la montée du fascisme prédominent.
En 1939, Simplicus change de nom pour devenir Le Simple*. Malgré la guerre et l’occupation allemande, la revue maintient un temps ses activités mais ses auteurs sont pourchassés. Adolf Hoffmeister, qui parvient à échapper à la Gestapo, s’exile aux États-Unis après un bref détour par la prison de la Santé à Paris. Dans le recueil Touriste malgré soi, écrit en 1941, il dessine de féroces dessins contre le système nazi. »


* (sic) probablement le Simpl’, comme le Simplicissimus était familièrement nommé.


14 novembre 2012

Simplicissimus en exil






« [Le Simplicissimus] reparut à Prague en langue allemande et tchèque, dirigé par Heinz Pol, s’efforçant de redonner vie au Simplicissimus de Thomas Th. Heine sous le titre Der wahre Simplicissimus. Th. Th. Heine [qui était réfugié alors en Tchécoslovaquie] désavoua le journal par peur des réactions nazies et menaça d’un procès la rédaction de Prague. Celle-ci reconnut dans un article que Th. Th. Heine n’avait aucun rapport avec le journal. Le premier numéro de Simplicus parut le 25 janvier 1934, raillant le Simplicissimus qui avait fait la paix avec les nazis. Il cessa de paraître le 26 juin 1935, faute de moyens financiers. »

Jean-Michel Palmier, Weimar en exil, note 2, p. 209.